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Le dernier rapport du Bureau Conjoint des Nations-Unies aux Droits de l’homme et la politique de la chaise vidée

Le dernier rapport du Bureau Conjoint des Nations-Unies aux Droits de l’homme et la politique de la chaise vidée

Le dernier rapport du Bureau Conjoint des Nations-Unies aux Droits de l’homme et la politique de la chaise vidée IN

Par Jean-Pierre Mbelu

Il n’est pas rare d’entendre certains compatriotes inviter certains autres à éviter la politique de la chaise vide. Cette invitation dénie le fait que l’espace politique n’existe plus au Congo (et ailleurs). Et qu’il est à réinventer à partir d’un temps propre. C’est-à-dire celui qui n’est pas soumis à la marche que semble nous imposer le réseau transnational de prédation chez nous. Oui. L’espace politique a été remplacé par celui de la mort au Congo dit démocratique. Ce dernier rapport du BCNDH en témoigne.

Après la mascarade électorale de 2006, la FIDH rédigeait un rapport intitulé « République  démocratique du Congo. La dérive autoritaire du pouvoir ». Ce rapport  donne, sur la première page, quelques exemples des Conventions relatives à la protection des droits de l’homme ratifiées par notre pays. Le dernier rapport du BCNDH  indiquant le cadre de légal ayant servi de référence à son travail se livre à peu près à un même exercice. Il note, par exemple, ceci : « L’ensemble des droits visés par le présent rapport, à savoir le droit à la vie, le droit à l’intégrité physique et le droit à la liberté et à la sécurité de la personne, sont garantis et protégés par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP)  et la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) .

En tant qu’Etat ayant ratifié ces conventions, la RDC est tenue d’assurer l’exercice des libertés fondamentales, y compris en période électorale, et de garantir leur protection par les différentes institutions en charge de l’application des lois11. Elle est également tenue d’exercer la diligence nécessaire pour prévenir et réprimer les violations de ces droits commises par des membres de ses propres forces de défense et de sécurité ou des acteurs non étatiques. » Il  cite même le Constitution du pays en ces termes : «  La Constitution de la RDC du 18 février 2006 garantit également le respect de ces droits12.

Plus spécifiquement, l’Article 16 de la Constitution dispose notamment que « La personne humaine est sacrée. L’Etat a l’obligation de la respecter et de la protéger. Toute personne a droit à la vie, à l’intégrité physique ainsi qu’au libre développement de sa personnalité dans le respect de la loi, de l’ordre public, du droit d’autrui et des bonnes moeurs. Nul ne peut être tenu en esclavage ni dans une condition analogue. Nul ne peut être soumis à un traitement cruel, inhumain ou dégradant. Nul ne peut être astreint à un travail forcé ou obligatoire. »

Le BCNDH évoque  aussi les textes légaux auxquels les forces armées et la police nationale doivent être soumis.  Il écrit : « Dans le cadre des élections, les attributions des FARDC, de la PNC et autres corps des forces de sécurité ont été précisées dans le Décret n° 05/026 du 6 mai 2005 portant plan opérationnel de sécurisation du processus électoral. L’article 27 du décret précité conditionne la constitution au sein des FARDC d’unités de réserve prêtes à renforcer la PNC dans l’exécution du maintien et du rétablissement de l’ordre public (MROP) à une réquisition préalable de l’Autorité politico-administrative, à savoir le Vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur, la Sécurité , la Décentralisation et l’Aménagement du territoire, M. Adolphe Lumanu  , ou de la CENI , par le biais de son président, le Révérend Pasteur Daniel Ngoy Mulunda ».

L’article 28 du décret précité restreint également les activités de la GR en période électorale à « la garde et la protection du Président de la République , ainsi que ses hôtes de marque et la sécurité des installations présidentielles ». »

A lire ce rapport du BCNDH tombé dans nos boîtes e-mail ce mardi 20 mars 2012, aucune de ces dispositions légales ne semble avoir été respectée par « les  milices kabilistes » subdivisées en plusieurs unités aux dénominations fantaisistes. Si elles l’ont été, c’est avec le quitus de leurs responsables directs ou de leur autorité « immorale ».

Tirer à balles réelles sur  les Congolais et les Congolaises de manière indiscriminée et/ou ciblée et cela à travers (presque) toute la ville-province de Kinshasa devrait constituer un grave crime contre l’humanité. Tuer et emporter les cadavres, enlever  des paisibles citoyens  de chez eux pour aller les torturer, les tuer, les éventrer et jeter leurs cadavres dans le fleuve  et ne pas permettre aux leurs d’organiser le deuil, c’est le comble de l’inhumanité.

Il n’est pas croyable que plusieurs parmi nos politiciens (ou ce qui en reste) en viennent à mettre entre parenthèses « ce génocide silencieux » pour éviter ce qu’ils appellent « la politique de la chaise vide ». Où est la politique dans un pays où les règles et les procédures du jeu  ne sont pas du tout respectées, dans un pays où la justice est foulée au pied ? Où est la politique dans un pays où le pouvoir d’occupation transnational a vidé les chaises où siègent les gouvernants de tout pouvoir en en faisant les marionnettes d’un néolibéralisme cynique ? Où est la politique dans un pays où l’exercice des droits et libertés fondamentales par son détenteur (c’est-à-dire le peuple) conduit à la mort ?

Au Congo, il n’y a plus d’espace politique viable. Notre pays est devenu une jungle où règne la loi de la nature. Nous avons, tous et chacun là où il est, le devoir de réinventer l’espace politique rationnel et raisonnable. Nous avons aussi le devoir d’inventer notre temps en rompant avec le processus de la mort initié par le réseau d’élite de prédation transnational depuis 1996. Et même avant. Oui. Nous devons inventer notre temps. « Les petits » restent y travaillent avec acharnement.

Par Jean-Pierre Mbelu

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