L’analyste politique Jean-Pierre Mbelu décrypte le rôle de Barack Obama et des USA dans les derniers événements autour des négociations de Kampala, dénonce le concept de « cohésion nationale » et explique les enjeux de la paupérisation mentale, morale, spirituelle et matérielle de nos populations.
Sur le sens de l’appel de Barack Obama à Paul Kagamé
Il y a un changement qui est en train de se préparer dans la sous région des Grands Lacs, mais pas un changement pour pouvoir mettre fin aux souffrances des congolais, simplement un changement qui permettra aux américains et leurs alliés de continuer de contrôler la région.
Sur le contenu du message de Barack Obama à Kagamé
Comment peut-on exhorter un criminel de guerre à pouvoir cesser le soutien qu’il offre aux criminels qu’il constitue en milices ? C’est juste une façon de dire que derrière Kagamé, il y a ce pays, les USA, qui a orchestré cette guerre de basse intensité contre nous et qui ne serait pas prêt à couper la branche sur laquelle il est assis. S’il ose le faire, c’est qu’il a trouvé un remplaçant à Paul Kagamé qui pourrait poursuivre le sale boulot.
Sur les relations entre Kagamé et les USA
Les américains peuvent à tout moment changer leur fusil d’épaule. Dans leur mode de fonctionnement, ils donnent parfois l’impression de reculer mais souvent, c’est pour lieux sauter. S’ils ne trouvent pas mieux pour remplacer Kagamé, ils vont le garder tout en essayant de donner l’impression qu’ils l’ont désavoué. Les USA ont toujours été du côté des dictateurs qu’ils créent.
Sur la démarche de la CENCO
Chercher à créer une cohésion nationale autour de quelqu’un qui ne jouit pas d’une véritable légitimité politique, c’est s’engager sur une fausse piste… Du fait de la complicité entre le pouvoir de Kinshasa, Kampala et Kigali, donc l’Eglise catholique risque d’être accusée demain d’avoir participé au jeu auquel se livre Joseph Kabila., celui de l’émiettement de notre pays.
Sur le concept de cohésion nationale
Nos populations sont obligés de se référer à des radios étrangères pour avoir des bribes d’informations sur ce qui se passe dans notre pays. Autour de quoi allons-nous construire la cohésion nationale ?
Nos populations ne participent pas au partage des retombées de la gestion du pays. Il n’y a que le 1% des jouisseurs qui pour la plupart coopèrent avec le Rwanda, l’Ouganda et le M23 qui prennent l’essentiel du gâteau. Comment voulez-vous demander aux populations paupérisées et mourantes de pouvoir se mobiliser pour une cohésion nationale autour d’une question dont elles ne connaissent ni les tenants ni les aboutissants ?
Sur ce qui est essentiel pour nous
Ce qui est essentiel pour nous, ce n’est pas ce théâtre de guerre à l’Est de notre pays. L’essentiel, c’est que nous puissions avoir ce qu’il nous faut pour jouir de notre souveraineté politique, économique et culturelle. Or ces messieurs qui sont au pouvoir à Kinshasa et qui disent qu’ils sont en guerre contre le Rwanda, l’Ouganda et le M23, ont déjà hypothéqué le pays, aux multinationales et à leurs parrains.
Sur la stratégie de Kabila et du pouvoir de Kinshasa
Ils vous créent une guerre, ils vous tiennent un discours que vous pouvez avaler facilement, pour pouvoir s’imposer sur vous et poursuivre leurs macabres besognes, c’est-à-dire : vendre le pays, le piller à moindre frais, tuer et violer, s’enrichir illégalement et illégitimement et plonger des masses entières de nos populations dans une misère qui ne dit pas son nom.
Sur le caractère multinational du Congo
Il faudrait que nous nous rendions à l’évidence que si nous ne reconduisons pas la multi nationalité de notre pays, nous ne réussirons pas à en faire un Etat aussi centralisé que nous le voulons. Et que le Congo ne peut s’épanouir qu’à partir de la reconstitution et l’autonomisation de ces multi nations et de leur fédération autour des valeurs et des règles partagées ensemble.
Sur le manque d’informations des médias congolais sur les enjeux du pays
C’est une façon d’exclure nos populations de l’information pouvant contribuer à la naissance d’un esprit critique, pour que le 1% auquel appartiennent la plupart des politiques congolais, de la soi-disant majorité présidentielle et de l’opposition, puisse à jamais régner sur nos masses populaires.
Sur le rôle du gouvernement congolais actuel
La conquête des cœurs et des esprits précède celle des terres. Quand vous réussissez à captiver les cœurs et les esprits des populations en les paupérisant spirituellement, mentalement, moralement, et même matériellement, vous réussissez facilement à pouvoir les piller, les dompter, les tuer et les exclure du partage du gâteau national. C’est ce que le gouvernement congolais actuel fait, appauvrir anthropologiquement nos populations pour qu’elles ne soient capable de réclamer quoique ce soit.
Sur le renversement des rapports de force
Nous avons besoin de la renaissance d’une autre classe politique qui pourrait comprendre qu’en essayant de créer ou recréer des lieux d’apprentissage en commun avec nos masses populaires que nous réussirons à renverser les rapports de force qui nous sont défavorables jusqu’à ce jour.