Par l’ASBL “Les Héritiers de la justice”.
Une perspective d’arrestation du Général Bosco Ntaganda met les provinces du Sud et du NordKivu en effervescence.
Les provinces du Sud et du NordKivu sont en effervescence en ce début du mois d’avril 2012. La situation sécuritaire est globalement marquée par une psychose générale ponctuée des échanges des tirs d’armes en certains endroits à l’intérieur des provinces entre les militaires qui se disent de l’exCNDP et les autres éléments des FARDC, la défection de certains hommes de troupe, notamment les partisans et fidèles du Général Bosco Ntaganda, le départ des dépendants des militaires de certains territoires où ils vivaient, les échos de détournement de la solde des militaires, etc. Les autorités militaires provinciales et nationales s’évertuent à calmer le jeu mais y parviendrontelles sans faire des casses ? Qu’estce qui se cache derrière cette effervescence ?
Selon différentes sources concordantes récoltées sur le terrain, tout serait parti de la visite de monsieur Didier Reynders, ministre belge des affaires étrangères, à Kinshasa. A l’issue de sa visite, des rumeurs ont circulé avec grande intensité comme quoi, le gouvernement congolais aurait finalement accepté de coopérer avec la CPI notamment en livrant le Général Bosco Ntaganda à la Cour Pénale Internationale (CPI) pour qu’il présente ses moyens de défense dans l’accusation sur sa participation présumée à l’enrôlement des enfants dans l’armée en Ituri dans la Province Orientale en collaboration avec le Général Thomas Lubanga.
Il vous souviendra que la CPI avait déjà lancé un mandat d’arrêt international contre le Général Bosco Ntaganda mais compte tenu de la situation sécuritaire trouble qui prévaut dans les provinces du Nord et Sud Kivu, le Chef de l’Etat congolais Joseph Kabila, préoccupé par la question de la paix à l’Est de la République, aurait accordé la priorité à la restauration de la paix et de l’autorité de l’Etat en lieu et place de répondre aux exigences de la justice internationale.
La situation ayant suffisamment évolué et comme les exrebelles avaient été déjà intégrés dans les FARDC et responsabilisés pour la plupart des postes de commandements des régiments, les populations civiles de ces deux provinces étaient surprises de constater qu’à la suite de ces rumeurs, encore à vérifier, les partisans de cet exchef de milice, c’estàdire les éléments des FARDC issus de l’exCNDP ont réagi négativement en désertant les rangs et prendre une destination inconnue. Ainsi, au NordKivu, on a observé des escarmouches, un mouvement suspect marqué par des retranchements de certaines factions, des réunions clandestines, des grognes, etc.
A Uvira, il s’est observé une infiltration dans la cité de certains individus munis d’armes à feu. Il s’agit de monsieur Bizimana Sebagabo et Rukundo Mutabazi qui ont été surpris avec ces matériels de guerre dans leur chambre à l’hôtel Tanganyika. Ils n’ont pas tardé à entrer dans le collimateur des agents de sécurité au point qu’ils ont été arrêtés et détenus au cachot de l’Auditorat militaire d’Uvira jusqu’au dimanche 25/03/2012, lorsqu’un commando composé de plusieurs dizaines d’hommes a fait irruption sur les lieux de leur détention et les a fait relâcher. Ils ont pris une destination inconnue.
Le 26/03/2012, un accrochage a été signalé à Hongera, à 4 km de Kiliba dans le territoire d’Uvira. Le Bilan de ces échanges des tirs a fait état de 4 morts dont un élément de FNL, un Maimai,…. Et un certain Batachoka Gorama de Kahala a été capturé.
Le 31/03/2012, entre Bwegera et Nyamutiri dans la collectivitréchefferie Plaine de la Ruzizi en territoire d’Uvira, un certain Bata, mécanicien de son état qui revenait du coté de Kiringye pour dépanner un véhicule a été tué, vers 19h°°, à bout portant par des inconnus. Dans la foulée, monsieur Safari Mandende, boucher de Luvungi, a lui aussi été blessé par balles par les mêmes hommes armés non autrement identifiés.
A Bukavu, la situation n’est pas, non plus rose. Dans la nuit du 1er avril 2012, des hommes armés ont attaqué le voisinage du domicile du Pasteur Eugène Bujiriri, responsable de l’église de la 5è CELPA Philadelphie, non loin du rond point de la Place Mulamba, en commune d’Ibanda. Un des assaillants aurait été appréhendé par les militaires des FARDC venus au secours du pasteur précité mais les proches du bandit présumé sont parvenus à le faire relâcher à la suite d’un échange des tirs nourris entre les deux camps créant une panique généralisée dans le quartier.
Le même soir, les militaires du 105è Régiment des FARDC basés à Baraka se sont se regroupés avec des armes lourdes dans la perspective d’une éventuelle défection. Ils ont pris sur eux la solde destinée aux autres militaires restés sur leurs positions à Baraka dans le territoire de Fizi. Le 02/04/2012, deux camions de marque FUSO auraient été aperçus en train d’embarquer, à partir de Baraka, les dépendants desdits militaires. Leur commandant, le Colonel Kifaru, ne s’était curieusement pas fait voir.
Seulement voilà : quelques heures plus tard après le retranchement de ses hommes, l’opinion a appris que cet officier supérieur des FARDC aurait été grièvement blessé vers Nyabibwe en territoire de Kalehe à environ 300 km de son poste d’attache sur la route qui mène vers le NordKivu. Le véhicule à bord duquel il se déplaçait aurait été la cible des tirs d’autres hommes de troupe qui se seraient aussi révoltés visàvis de leur commandant, le colonel Biyoyo au motif que leur solde était impayée. Dans l’entretemps, les militaires dont la solde aurait été détournée par le commandant précité sont montés au créneau et ont fait crépiter des balles le 02/04/2012.
Comme les échanges des tirs ne se comptent plus dans le territoire de Fizi, à la meme date du 02 avril, il a été signalé que les balles ont sifflé dans les localités de Lulimba, de Fizicentre et à Baraka même.
C’est grâce aux efforts conjugués entre la MONUSCO et la hiérarchie des FARDC qu’un calme apparent est rentré dans la province. Mais le feu couve : car les familles des militaires des FARDC qui étaient à Nyabibwe auraient fait mouvement dans tous les sens : les uns vers Bukavu, d’autre en direction du NordKivu, … Les militaires issus de l’exCNDP sont difficilement visibles à Bukavu comme par le passé. Auraientils, selon plusieurs sources encore à vérifier, pris la direction de hauts plateaux de Kalehe, ou la direction du NordKivu ? Ceuxlà qui étaient basés à Kamanyola en collectivitéchefferie de Ngweshe sur la route BukavuUvira se seraient dirigés vers les hauts plateaux qui surplombent le groupement Kamanyola. Dans leur fuite, ils seraient partis avec armes et munitions. Aux dernières nouvelles, nous apprenons que les soldats loyalistes les auraient poursuivis jusqu’à ce qu’ils les ont rattrapés et leur ont arraché lesdites armes et munitions.
De Goma, au cheflieu de la province du Nord Kivu, nous apprenons que c’est le même son de cloche. A Kahuruma, à plus au moins 30 km de Kashindi, un peloton des militaires exCNDP aurait déserté les rangs des FARDC pour une destination inconnue. La nuit du 03 au 04 avril 2012, environ une compagnie d’autres militaires fidèles au Général s’est retranchée. Le même jour, dans la ville de Goma, le Général Bosco Ntaganda a fait une démonstration de force qui a paniqué les habitants de cette ville volcanique. Plusieurs sources indiquent qu’il a fait mouvement avec 20 Jeeps pimpant neuf et bondée de militaires à destination de Katale et Nyanzale, toujours au Nord Kivu.
C’est dans cette atmosphère de psychose que les habitants du SudKivu et ceux du NordKivu sont en train de préparer la fête des Pâques. Les autorités militaires tant au niveau provincial que nationales se sont immédiatement déployées sur le terrain pour pallier à toute éventualité. Nous avons appris que le Chef d’Etat major des Forces Terrestres des FARDC, le Commandant de la 10è Région Militaire ainsi que le Commandant des opérations Amani Leo se sont rendus sur le terrain dans le Sud de la Province à ce sujet. La question qui reste est celle de savoir qui a occupé le terrain abandonné par les soldats mutins à Baraka et ailleurs.
Face à tout ce tableau on ne peut plus sombre, l’asbl Héritiers de la Justice est préoccupée par ce contexte controversé qui vient troubler la conscience des paisibles citoyens qui attendent impatiemment le dénouement de la crise née du contentieux électoral par l’installation du bureau définitif du parlement national, du Sénat et du gouvernement. « Il n’y a pas de paix sans justice » dit on, mais dans l’entretemps il ne faudrait pas que ce souci de paix soit un prélude à des violations massives des droits humains.
Bukavu, le 05 avril 2012.
Héritiers de la Justice